Almouaten 24 – chouib sahnoun
Les Juifs de la région de Béni Mellal partis au lendemain de la proclamation de l’Etat d’Israël gardent toujours de bons souvenirs du vivre-ensemble et des liens de bon voisinage. Récits autobiographiques et témoignages. Un lieu. Une histoire. Le lieu est le mellah de Béni Mellal, situé entre l’avenue Tamgnount et la place Al Attara et ses ruelles très commerçantes. L’histoire est celle des Juifs ayant habité les lieux durant de longues années avant d’immigrer en Israël, au lendemain de la création de l’Etat. Malgré leur départ, les liens de bon voisinage et les valeurs de cohabitation et du vivre-ensemble ont été préservées. «Cette demeure était souvent visitée par des Juifs. Leur dernière visite remonte à la période d’avant l’apparition de l’épidémie du nouveau coronavirus, quand deux jeunes juifs s’étaient rendus sur les lieux pour se renseigner sur l’habitation de leur parents. Une vieille voisine leur avait déclaré qu’elle connaissait leurs parents et leur demeure était celle où elle était installée. Après avoir recueilli ces informations, ils sont retournés, en compagnie de leurs parents, chez la locataire de la demeure qui les avait chaleureusement accueillis», a déclaré la voisine de cette vieille femme. Depuis lors, selon le témoignage recueilli sur les lieux, les Juifs de la zone se rendent souvent dans le Mellah et prennent des photos en guise de souvenirs de toute cette histoire. Dans le quartier de la résistance, où plusieurs Juifs étaient installés, certaines habitations ont disparu et d’autres demeurent toujours habitées par des Marocains. Le site comprenait un lieu sacré de culte, transformé en résidence. Son
locataire, qui l’avait récupéré en 1974, l’a réaménagé, en transformant les bois qui servaient de toiture à l’espace, a-t-il déclaré. Et de souligner qu’il avait regretté d’avoir effectué ces transformations en supprimant le bois qui comportait des images de la ville d’Al Qods. Cet espace, ajoute ce locataire, fait souvent l’objet de visite des
Juifs qui le prennent en photo.
La même nostalgie a également été exprimée par Mbarka, née dans ce quartier en 1954. Cette vieille locataire du quartier se rappelle du triste jour où les Juifs avaient quitté les lieux. «On avait les larmes aux yeux», se rappelle-elle, indiquant que leurs petits-enfants rendaient toujours visite à ces lieux. Les Juifs Alice et Maurice étaient des symboles de la communauté juive de la ville. Alice Suissa affirme que sa famille était réputée dans la région mais, vers la fin des années soixante-dix, plusieurs membres de cette famille ont rejoint Israël, sauf son père et elle. Après des études à Casablanca, Alice a ouvert un espace de coiffure dans la ville où elle reçoit toujours ses amies d’ici et d’ailleurs, a-t-elle précisé. Une histoire riche qui a également ses traces sur l’autre rive de Oued Oum Errabiâ, à Kasba Tadla où des marabouts, notamment celui de Sidi Cadi Haja que des Juifs visitaient chaque fois qu’ils se rendaient au Maroc. Enfin, l’explorateur français, Charles de Foucauld avait publié des statistiques qui dénombraient trois mille habitants dans la ville de Béni Mellal, dont 10% (environ 300) étaient des Juifs qui résidaient